Michel Pajon, 69 ans, maire (PS) de Noisy-le-Grand de 1995 à 2015 a été jugé pour prise illégale d’intérêts. Il a signé des permis de construire dans des programmes immobiliers dans lesquels il détenait des logements.
Il fait nuit depuis longtemps sur Bobigny, lorsque leprocureur, Marc Bourragué rappelle le sens de la loi sur la prise illégaled'intérêts : « c'est pour imposer une protection aux élus. Dès que vous avez unintérêt à la chose, éloignez-vous. » Selon lui, dès lors que Michel Pajon,alors maire de Noisy-le-Grand, avait acheté six appartements dans un programmeimmobilier, il ne pouvait plus signer de permis de construire relatif auxconstructions. Il a réclamé dix mois avec sursis contre l'ancien élusocialiste, une peine « de principe, symbolique mais ferme pour être comprisede tous les élus », et 3 mois avec sursis pour recel, contre l'ex-compagne, 47ans, qui avait aussi acheté deux appartements.
Tout est parti d'un signalement en février 2016 de lahaute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), créée par laloi de 2013 suite à l'affaire Cahuzac, et votée par Michel Pajon, puisqu'ilétait alors député.
On s'intéresse au patrimoine de l'élu, maître deconférences en économie et à la tête d'une vingtaine de logements, pour plus de5 M€, et notamment ces appartements achetés depuis 2005 dans les programmes «Léo » et « Château d'eau » des promoteurs Alba Promotion et Pietrogiovanna.
« J'ai toujours investi dans des logements »
« J'ai signé des permis ensuite car je n'ai pas vu deconflit d'intérêts, assure Michel Pajon à la barre, dans un fauteuil roulant.Je travaillais 100 heures par semaine pour la ville, je n'avais pas forcémentle temps de m'occuper de tous les détails. Noisy-le-Grand, c'est 70 000habitants, la capitale économique de l'Est parisien, je terminais mes journéesà 22h30, 23 heures, en signant les parapheurs, je n'ai pas assuré la défense demes intérêts personnels. »
Son ex-compagne, reconvertie en coach, assure elleavoir « fonctionné comme une bonne mère de famille, en achetant trois studiospour ses trois enfants », le dernier étant le fils de Michel Pajon.
« J'ai toujours investi dans des logements, reprendMichel Pajon, car en tant que célibataire, on est soumis à une forte taxationdu fisc. Avant d'être maire (de 1995 à 2015, NDLR) j'avais 14appartements et une maison, ça représentait déjà 2 millions d'euros de capital,et je payais mon ISF tous les ans. Je n'ai jamais fait de cadeaux à personne !»
« Ce n'est pas le problème ! recadre vertement leprésident de la 15e chambre. On ne vous reproche pas de corruption, mais laprise illégale d'intérêts, ce n'était pas à vous de signer des actes alors quevous aviez des intérêts dans ces programmes. »
« Si j'avais su que je n'avais pas à le faire, jel'aurais délégué à un maire adjoint. » Serge Epinard, adjoint de l'époque estvenu à la barre pour en témoigner, répétant qu'« aucun cadeau n'avait jamaisété fait à personne ».
Prêt à reconquérir sa ville
Quid du prix d'un F2, acheté à 191000 € alors que leslogements des étages inférieurs ont été vendus à 200000 voire 240000 € ?
« Les autres acheteurs se sont fait avoir, et moiaussi j'ai payé trop cher, car 5 ans plus tard, il valait 172 000 € », répondl'ancien maire.
Pour le procureur, il y a « sans doute eu desarrangements commerciaux, mais pas de corruption ».
Pendant plus de deux heures, Mes Boué Diacquenod etCléry-Mélin se sont employés à démontrer qu'il n'y avait eu « aucun abus, niintérêt personnel » permis par la signature des permis.
« Si vous le condamnez vous devez poursuivre tous lesconseillers municipaux qui votent le plan local d'urbanisme ! » a plaidé MeCléry-Mélin, tandis que Michel Pajon, a publiquement annoncé son souhait dereconquérir la mairie.
« C'est ça qui me fait vivre, ma passion, c'est maville. Et je vous promets que je n'achèterai plus jamais d'appartement sur laville ! » Le jugement sera rendu le 26 octobre.